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jeudi

Tsitsernakabert : le Fort aux hirondelles

2 août 2010, Erevan

Je me réveille à Erevan. Il est six heures du matin… le décalage horaire (+3 heures) ne joue pas en ma faveur, mais ma volonté de découvrir la ville est plus forte que la fatigue. J’assiste au lever du soleil qui monte peu à peu dans le dos de "Mère Arménie" (May Hayrenik), une grande statue de style soviétique qui trône sur la ville. Par chance, j’avais pris le contact d’Anaït Stepanian, la fille d’un grand artiste arménien, mort en 1977. Elle accueille des voyageurs pour gagner sa vie. Sa maison cumule les fonctions : habitat, auberge et musée.
Aussi étrange que cela puisse paraître, je me sens bien dans cet espace chargé de symboles et de vieux objets. Pour certains, cela apparaîtrait comme un fouillis, pour moi, il respire la vie. Je prends le temps de parler avec Galiané, la sœur d’Anaït, qui m’invite à prendre le thé chez elle. Elles sont voisines. Anaït reçoit un groupe de touristes, je dois donc quitter les lieux. Sa sœur m’invite à passer une nuit chez elle. Je découvre alors les talents de leur père : peintre, sculpteur, inventeur… Galiané me raconte son parcours de vie entre Erevan, Moscou et l’Italie. Plusieurs résidences artistiques, des expositions et plus de 300 livres illustrés. Son père était néanmoins contraint de conformer sa créativité aux exigences du régime soviétique. Il n’a pas été emprisonné mais a échappé de peu à la répression… Celà n’a pas été le cas pour d’autres artistes qu’il côtoyait, comme Ervand Kochar et Sergei Parajanov, dont on peut visiter les maisons au centre d’Erevan. Je ne manquerai pas de les visiter durant mon séjour.

Je décide d’aller me recueillir au Mémorial pour commencer mon voyage. Je dois rejoindre Vatché, Sevan et Lia, que j’ai rencontrés dans l’avion, qui, tout comme ma famille, ont été coupés de la "mère patrie" lors du Génocide de 1915. Le Mémorial, aussi appelé "Fort aux hirondelles" (Tsitsernakaberd), m’apprend bien des choses sur l’Arménie d’avant le Génocide.





Le territoire qui était englobé dans l’Empire Ottoman était divisé en Provinces. Huit sont aujourd’hui en Turquie. Le Mémorial les symbolise sous forme de colonnes autour de la flamme éternelle qui immortalise les disparus. J’éprouve énormément d’émotion devant les différentes représentations de ce passé qui nous a déchiré, qui nous a éparpillé.
Je prends conscience, dans le musée qui est accolé au Mémorial, des souffrances qu’ont endurés mes aïeux. Je comprends également la chance que j’ai d’être en vie, de la vie que je mène en France aujourd’hui, loin des troubles du passé. Je prends aussi conscience du devoir que j’ai d’honorer les victimes par le travail que j’entreprends…
Les larmes aux yeux, je quitte le musée. Triste aujourd’hui, pour être heureux demain… Le voyage rapproche du passé mais permet également d’envisager l’avenir… Je redescends en ville à pied, quelques heures de marche sont nécessaires pour digérer ce que je viens d’éprouver…

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